HOMMAGE MACONNIQUE A S.A.R. LE PRINCE PHILIPPE D’ARAUCANIE ET DE PATAGONIE.

24 Mars 2015 , Rédigé par Comte Raoul de Savery-Emboise.

Sceau de la Loge "Stella Philippi Araucaniae".

I - Un peu d’histoire…

On sait, particulièrement depuis la passionnante étude publiée en 1962 par le Comte Léon M. de Moulin - Feuillet sous le titre « Les Rois d‘Araucanie et la Franc-Maçonnerie« (in Cahiers de l’Académie des Hautes Études Araucaniennes n°6, republiée en 1998 dans les « Cahiers Villard de Honnecourt » n° 40 de la Grande Loge Nationale Française), que les trois premiers Souverains d’Araucanie - Patagonie furent tous trois maçons :

* Orélie-Antoine Ier, Roi fondateur, fut membre de la Loge « Les Amis Persévérants » du Grand Orient de France, basée à Périgueux. A son premier retour en France, le Roi publia chez « Dantu » une « prière maçonnique » conservée par la postérité.

* Achille Ier, son successeur, reçut pour sa part de Jean-Baptiste Pessina, Grand Maître Suprême du rite de Misraïm en Italie, une patente datée du 3 mars 1891, aux termes de laquelle il était autorisé en sa qualité de Souverain d’Araucanie et de Patagonie, à constituer le « Grand Conseil Impérial du rite » dans ses états au moment où il le jugerait opportun. Le 20 avril 1893, il s’affilie à la Loge « du Buisson Argent et Pyramides », située à Paris (dépendant de la Puissance Suprême du Rite Oriental de Misraïm pour la France), et y prononce le jeudi 18 mai 1893 une conférence sous la forme d’un « Exposé sommaire du Plan Général de Travaux sur la question sociale ». Plus tardivement, le Roi Achille fut reçu dans une Loge Parisienne du Grand Orient de France, « L’Union des Peuples », pratiquant elle un rite Écossais. Il semble probable au demeurant que le Roi Achille ne pratiqua que les degrés supérieurs de la maçonnerie, et jamais les trois premiers.

* Antoine II, quant à lui, fut membre du Grand Orient de France, et rédigea avec le musicien Charles de Sivry une symphonie maçonnique intitulée « la légende d’Hiram », qui fut représentée en 1878 à la salle des fêtes du Trocadéro, à Paris.

A notre connaissance, aucun des deux Souverains suivants, la Reine Laure-Thérèse et son fils le Roi Jacques-Antoine III, ne furent membres de la maçonnerie.

Cependant, le fascicule publié par le Comte de Moulin-Feuillet en 1962, suivi d’un second du même auteur publié en 1963 sous le titre « La succession Royale d’Araucanie et l’Ordre Maçonnique de Memphis et Misraïm (rite Égyptien) » (in Cahiers de l’Académie des Hautes Études Araucaniennes n°9) suscitèrent d’autant plus l’intérêt et la curiosité que l’auteur démontrait, dans son second ouvrage, que seul le Souverain d’Araucanie pouvait encore prétendre détenir ès-qualités une filiation indiscutable dans l’Ordre de Misraïm.

Dans son ouvrage intitulé « Histoire du Royaume d’Araucanie », publié en 1979 par le Souvenir Franco-Araucanien (S.F.A.), le Prince Philippe Ier, sixième Souverain, rappelait l’existence de ce droit, dont il semblait n’avoir jusqu’alors pas usé. Cela n’échappa pas à la vigilance de Jean-Pierre Giudicelli de Cressac Bachelerie, ésotériste renommé, auteur d’un ouvrage remarqué publié en 1988 sous le titre de « Pour la rose rouge et la Croix d’Or », dans lequel il évoque (p. 66 dans l‘édition du « Mercure Dauphinois ») la filiation du Prince Philippe comme faisant partie des « Ordres qui sont restés sur la ligne traditionnelle, c’est-à-dire pour le retour aux Arcana Arcanorum, filiation Rombauts ».

Pour autant, le Prince Philippe n’est pas demeuré inactif, bien qu’il se garde de l’évoquer publiquement. Dans son ouvrage célèbre « La Franc-maçonnerie égyptienne de Memphis-Misraïm », publié aux éditions « Dervy », Serge Caillet, historien réputé de l’occultisme, écrit (p. 289 de la deuxième édition en 2003) : « (…) En 1963, Dubois (Nb: Henri Dubois, alors Grand Maître depuis 1959 du Suprême Conseil des ordres maçonniques de Memphis et Misraïm réunis pour la France) correspond avec un certain Philippe, soi-disant roi d’Araucanie-Patagonie, détenteur d’une charte remise à Achille Laviarde, dit Achille Ier, reçu au titre de Misraïm par la Puissance Suprême de Paris, en 1891, et reconnu en date du 20 février 1891 comme 33è, 90è, 97è par Giambatista Pessina, au titre d’une obédience australe de Memphis et Misraïm. Ce Philippe, qui signe 33è, 95è, 97è et 127è (ce dernier grade se rapportant à la société secrète dite de l’Hétairie), l’a contacté par l’intermédiaire d’André Lainé, et qui rêve d’étendre sa juridiction… Mais ces relations ne seront que de simple courtoisie ».

Des traces écrites demeurent de cette période, et de ses prolongements… Mais ce que le Prince a souhaité conserver dans l’ombre doit le demeurer, dans l’intérêt de la Maison Royale, et de la noble cause que promeuvent ses différents Souverains…

C’est bien plus tard que le Prince Philippe d’Araucanie reçut à sa demande cette fois très publiquement un franc-maçon Sud-Américain se présentant comme « Souverain Grand Conservateur Général du rite de Memphis Misraïm ». L’audience, qui eut lieu le 7 janvier 2002 en sa Faculté de Levallois-Perret, dura plus de deux heures à en croire le compte-rendu rédigé par le Secrétariat Princier. Le visiteur était accompagné de son épouse, qu’il présenta comme d’origine Mapuche, et le Prince de l’un de ses proches conseillers, parfaitement hispanophone.

Selon les documents conservés dans les archives du Prince et les témoignages recueillis, un projet de constitution d’une obédience concurrente de la Grande Loge Unie d’Angleterre fut présenté, avec comme projet de désigner le Prince Philippe Grand Maître, à l’instar du Duc de Kent, cousin de le Reine Elisabeth II et Grand Maître de la G.L.U.A.

Dans le cours de l’année 2006, le Prince Philippe accepta cette proposition. A cette fin, le 2 septembre 2006, « Philippe Boiry Prince d’Araucanie » fut initié en maçonnerie sous l’égide de la « Grande Loge des Maçons Réguliers, Francs et Acceptés », et franchit le même jour les trois premiers grades de la maçonnerie, afin d’être désigné Grand Maître de la « Regular Grand Loge of England », dont dépendait la Grande Loge française. Le 5 novembre 2006, le Prince Philippe d’Araucanie était en outre élevé au 95ème degré du « Rite Ancien et Primitive de Memphis ».

A l’automne 2008 cependant, des tensions apparurent au sein de l’obédience française, et plusieurs de ses membres parmi les plus importants la quittèrent pour rejoindre une obédience sans lien avec la Grande Loge Régulière d’Angleterre: la Grande Loge Régulière Française. Assez rapidement, le Prince Philippe d’Araucanie les suivit, quittant ses fonctions de Grand Maître de la G.L.R.E…. pour être désigné, le 20 mars 2010 « Grand Maître d’Honneur » de la Grande Loge Régulière Française, fonction qu’il occupa jusqu’à son décès, le 5 janvier 2014.

A ceux qui l’interrogeaient sur son engagement dans la franc-maçonnerie, le Prince d’Araucanie, connu pour son appartenance au catholicisme le plus traditionaliste, répondait qu’il n’avait accepté qu’à la condition que rien ne fût contraire à l’Église Romaine, ce qu’il considérait être le cas dès lors que les deux obédiences qu’il avait rejointes imposaient la croyance en Dieu.

Selon nos informations, une longue période de deuil a été respectée au sein de la Grande Loge Régulière Française après son décès, un hommage rédigé par le Grand Maître étant lu dans toutes les loges de l’obédience.

II - Hommage maçonnique.

Les qualités humaines, la séduction naturelle, le talent oratoire du Prince Philippe lui ont valu, pendant les sept années de sa vie maçonnique, de nombreuses amitiés. C’est ainsi que, tout naturellement, l’idée a germé après son décès de lui rendre un hommage particulier au sein de l’obédience qu’il avait rejointe, en usant du rite dont il était détenteur.

Les amis français du Royaume d’Araucanie et de Patagonie comptant dans leurs rangs plusieurs membres de la franc-maçonnerie, des contacts furent pris dès le printemps de l’année 2014. Ils aboutirent rapidement à ce que l’un des plus anciens fidèles de la Maison Royale, franc-maçon réputé, « prenne en main » le choix d’un rituel authentique ainsi que l’ensemble des aspects spirituels de la création d’une Loge liée à la mémoire du Prince défunt.

D’autres, dans le même temps, oeuvraient aux questions matérielles, ainsi qu’aux contacts à prendre avec tous ceux qui, parmi les amis de la Cause Mapuche (francs-maçons ou désireux de le devenir), pourraient être intéressés à participer à cet hommage.

La date choisie fut bien entendue symbolique, la plus proche de l’anniversaire de naissance du défunt (le 19 février) : c’est le 17 février 2015 que fut constituée la « Respectable Loge Stella Philippi Araucaniae », consacrée à Paris le vendredi 27 février 2015. Dans le même temps, désireux de mener à bien le projet ébauché par le Prince Philippe au sein de la G.L.R.F., les mêmes amis de l’Araucanie - Patagonie créèrent au sein de la Grande Loge Régulière Française un « District d’Araucanie », qui regroupera l’ensemble des loges se réclamant du Royaume et de « son » rite de Misraïm. Nommé samedi 21 mars dernier, pour le quatrième anniversaire de la désignation du Prince en qualité de Grand Maître d’Honneur, le « Grand Inspecteur » pour District d’Araucanie est lui-même, tout comme le « Vénérable Maître » de la Loge, un fidèle ancien et respecté de la Cause Araucane - Patagone.

Tenu régulièrement informé tout au long des préparatifs, S.A.R. le Prince Stanislas Ier, actuel Souverain d’Araucanie (qui, contrairement à son prédécesseur, n’est pas membre de la franc-maçonnerie), a approuvé ce projet, considérant tout d’abord qu’il est conforme à l’histoire du Royaume, ensuite qu’il rend un hommage mérité à l’action maçonnique entreprise par le Prince Philippe pour faire vivre les droits reçus par le Roi Achille, et enfin que si le Souverain Araucan - Patagon est constitutionnellement de religion catholique Romaine, le peuple Mapuche demeure largement attaché à ses cultes traditionnels, dont le caractère immémorial correspond tout à fait, sous d’autres latitudes, à la Tradition Primordiale incarnée par la Franc-Maçonnerie occidentale.

Lors du repas (« agape ») qui a suivi la consécration de la Loge le 27 février, le représentant du Prince, en cette qualité membre d’honneur de la Loge, a transmis aux nombreux amis présents le salut et les encouragements du Prince Stanislas.

Le Souvenir Franco-Araucanien, qui publie cet article en sa qualité d’association civile chargée de maintenir le souvenir du Royaume et de ses souverains, est évidemment sans lien aucun avec cette Loge du Prince Philippe. Les amis et lecteurs intéressés pour la rejoindre devront s’adresser directement à celle-ci, sans user du truchement de notre association.

L’adresse de contact est : rl-stella-philippi@outlook.fr

Comte Raoul de Savery-Emboise.